par Pierre Perrault, 55 ans
Que de publicité autour de la fameuse « Liberté 55 »! Et pour cause : 55 ans est l’âge où l’on songe à prendre sa retraite et à profiter de la vie, après des années de travail. Mais pour moi qui, de plus, suis planificateur financier et assureur vie agréé, le chiffre magique de mes 55 ans fut le début d’un cauchemar. C’était du moins ce que j’avais l’impression de vivre à l’époque.
Lors de mon examen médical annuel, mon médecin de famille découvrait une concentration élevée d’ASP, mais le résultat de l’examen rectal numérique était normal. Ce fut le début d’une série de tests (échographie transrectale avec biopsies) pour connaître la signification de cette valeur élevée. En novembre 2002, j’apprenais que j’étais atteint d’un cancer de la prostate, avec un grade de Gleason de 6/10. Quel choc!
Confronté au nouveau diagnostic, je me questionnais sur ce que me réservait l’avenir et les implications de la maladie. À quel stade a-t-on détecté mon cancer? Est-il limité à la prostate ou s’est-il déjà propagé à l’extérieur de la glande prostatique? Sous le choc de cette nouvelle particulièrement stressante, je croyais que tout était fini pour moi et que je ne m’en sortirais pas. Nous savons tous que nous devons mourir un jour, mais pour la première fois de ma vie, j’étais confronté à ma propre mortalité. Combien de temps me restait-il à vivre? J’ai été alors envahi par une foule d’émotions – tristesse, découragement, peur de l’inconnu et, bien sûr, peur de la mort.
J’ai fini par digérer la nouvelle en me disant que je devais absolument réagir si je voulais m’en sortir. Je suis trop jeune pour mourir et j’ai envie de faire tellement de choses. Pour m’aider à prendre la décision la plus importante de ma vie, j’ai fait des recherches intensives sur Internet et dans des livres de médecine. J’ai également consulté mon médecin de famille, deux urologues, ainsi qu’un organisme formé d’une équipe médicale, un service offert par mon assurance-maladie privée. Je les ai bombardés de questions car, plus je serais renseigné sur ce cancer, ses traitements et ses effets secondaires, mieux je comprendrais ce qui m’arrive. Je pourrais alors prendre une décision éclairée concernant mes choix de traitements.
Les spécialistes m’ont offert les options suivantes : la technique du wait and see (attendre et voir), la prostatectomie radicale, la radiothérapie ou la curiethérapie. Comme vous le savez, tous les traitements comportent des effets secondaires et ils allaient influencer ma prise de décision. La perte temporaire du contrôle des urines, les problèmes d’érection ou les problèmes intestinaux font partie des effets secondaires qui pouvaient m’affecter, ce qui était loin de me plaire. J’étais prêt à subir certains traitements, mais je voulais aussi préserver ma qualité de vie.
Après avoir pesé le pour et le contre, j’ai finalement opté pour la curiethérapie, une intervention qui consiste à implanter, directement et de façon permanente, une soixantaine de petits grains radioactifs dans la glande prostatique. Selon les renseignements que j’ai recueillis, la possibilité d’effets secondaires de ce traitement semble moins élevée que ceux liés à d’autres traitements. Je suis donc parti à Québec, la seule ville de la province où l’on offre ce type d’intervention. Il s’agit d’une chirurgie d’un jour et tout s’est très bien passé. Durant les quelques mois qui ont suivi l’implantation des grains radioactifs, j’ai ressenti une certaine fatigue et j’ai diminué mes activités. Le seul effet secondaire que j’éprouve est une légère difficulté à uriner, surtout en me levant le matin. La pression durant la miction a également diminué. Ces effets sont apparemment passagers.
Je suis heureux de mon choix : je voulais un traitement dont les effets secondaires étaient tolérables et qui me permettrait de préserver ma qualité de vie. J’ai fait beaucoup de recherches pour mieux comprendre ma maladie. J’ai aussi consulté un psychologue et participé à des rencontres dans des groupes de soutien. Toutes ces démarches m’ont renseigné et rassuré. Actuellement, ma seule crainte est d’ignorer si mon cancer est guéri ou si, un jour, il refera surface. On me dit que ma réaction est tout à fait normale et je vis maintenant au jour le jour. J’essaie de profiter au maximum de tous les moments que m’offre la vie. Personne ne devrait attendre d’avoir 55 ans pour le faire.